[Fini] Bruit de Couloir (pv Sheeris)

Le cours de Défense contre les Forces du Mal fut.. intéressant sur bien des points, mais Alec savait qu'il ne devait pas trop s'attarder à la sortie du cours. La leçon finie, la distraction pour Sheeris prenait fin et elle se retrouvait à nouveau face à ses démons. Il l'avait observé et savait qu'elle n'était pas plus capable à l'instant d'y faire face qu'elle ne l'avait été deux heures auparavant. Ce fut donc sans un mot qu'il attrapa à nouveau la main de la gryffondor, la rassura d'un sourire puis commença à l'attirer pour qu'elle le suive. Sans un regard pour le reste de la classe, Alec entraina Sheeris à sa suite et ils quittèrent les lieux.

Ils étaient dans les couloirs et Alec marchait d'un bon pas. Pas trop rapide pour que sa compagne puisse suivre, mais pas lent non plus pour ne pas se faire rattraper. Il cherchait un endroit à l'abri des regards et des oreilles indiscrètes. Un endroit pour se cacher, pour la protéger elle, qu'il sentait très fébrile. Alec laissa ses pas le guider naturellement dans les couloirs du troisième étage et au détour d'un virage, il vit une tenture familière et avec une agilité et une finesse de danseur, il souleva un pan et laissa Sheeris s'aventurer en-dessous avant de se glisser derrière elle et de laisser la tapisserie leur servir de bouclier.
Derrière la décoration de tissu se trouvait une alcôve avec un banc de pierre au pied d'une fenêtre qui donnait sur les jardins. Les vitres de la fenêtre étaient des vitraux qui baignait l'alcôve d'une lumière colorée. Du bleu, rouge, vert, jaune.
Alec invita Sheeris à s'asseoir puis s'installa à ses côtés. Il reposa sa main entre eux deux, sa paume vers le ciel, au besoin.

La curiosité eut finalement raison de lui :

"Je suis là si tu as besoin de parler. Je pourrais t'aider ? Dis-moi ce qu'il s'est passé avant d'entrer en classe. C'est en rapport avec Tyler et Dimitri ?"

Et voilà. La fin du cours était arrivée trop vite au goût de Sheeris. Elle savait qu'elle allait devoir affronter ses deux paires d'yeux qu'elle sentait posé sur elle. Mais était elle prête pour ça aujourd'hui? Elle était tellement peu préparée à l'idée qu'elle en perdit son book de cours et que quelques dessins s'échappèrent. Elle le ramassa vite et le fourra dans son sac mais Alec avait tout vu.

Alors il lui attrapa de nouveau la main et l'attira à lui avec un sourire rassurant. Il l'entraina à sa suite hors de la salle. Gentiment mais fermement, il avançait dans l'allée de telle sorte qu'elle ne vit personne et même si quelqu'un tentait d'arrêter leur progression elle ne le remarquerait même pas

Il l'entraina en dehors et ils se perdirent dans le brouhaha des élèves. Il avait un pas vif que Sheeris suivit sans peine malgré ses talons. Elle avait l'habitude de marcher vite dans les couloirs. Naguère elle avait toujours eu mille choses à faire en même temps.

Elle se laissa conduire sans réellement imprimer les lieux qu'ils traversaient. Elle ne voyait qu'une grande main enveloppant la sienne, suivie d'un bras solide qui remontait sur un dos immense et large. Elle dut lever la tête pour apercevoir une crinière d'un noir de jais.

Alec était plutôt agile parmi la foule. Tel un chat, il évitait les élèves, zigzaguait entre les groupes. Ils finirent par arriver devant une tenture représentant des licornes dans une prairie. Alec souleva la tenture sans soucis et la fit passer derrière.

Elle resta un instant interdite devant le spectacle qui s'offrait à elle. Jamais elle n'aurait imaginé trouver ce genre de pièce derrière un rideau. L'alcôve était magnifique comme taillée à même la pierre. Un vitrail amenait le soleil qui inondait l'endroit de couleurs chatoyantes. Elle aurait pu admirer longtemps le jeu de lumières et de couleurs si Alec , lui tenant toujours la main, ne l'avait pas entrainé avec lui pour s'asseoir.

Elle lui lâcha la main pour s'installer. D'abord en appui sur le rebord du banc, elle décida de s'asseoir en tailleur , dos au mur face à Alec car ses pieds ne touchaient pas terre. Pour cela elle abandonna sac et chaussures au pied du banc et s'installa confortablement.

Alec s'installa à son tour. Il était très proche d'elle. Si proche qu'elle aurait pu toucher son visage si elle tendait la main. Mais il n'était pas invasif il lui laissait même le luxe de choisir leur degré d'intimité en posant sa grande main entre eux, la paume toujours tournée vers le ciel. Ce qui ne devait pas être une position confortable pour lui.

Sans s'en rendre compte, elle sourit. Elle remonta de cette main jusqu'à son visage. Elle se dit qu'elle le voyait pour la première fois avec une curiosité d'artiste. Il avait un visage légèrement hâlé, une mâchoire carrée volontaire que couvrait une barbe de 3 jours entretenue qui encadrait une bouche aux lèvres charnues et bien dessinées, un nez aquilin, deux grands yeux noisettes pétillants de curiosité  entourés de longs cils noirs que surmontaient des sourcils fournis dont l'un était barré d'une cicatrice. Le tout était couronné de cheveux ébouriffés d'où s'échappait une mèche rebelle qui lui tombait sur le front.

Tel qu'il était là dans la lumière du vitrail elle aurait pu le croquer sans aucune difficulté mais il prit soudain la parole. Il lui fallut quelques secondes pour que les paroles d'Alec ne la ramènent à la réalité brute du moment présent. Elle le regarda interloquée.

Je ...heu.... Comment ? *Allons respire un grand coup ! Calme toi! Tu passes pour une quiche là... allez on aligne deux mots corrects ma fille !*  se tensa t elle.

Aheum... Tu es perspicace toi... et plutôt direct.... J'avoue que tu me prends de court. Je .... Oui ce qui m'est arrivé en cours à un rapport avec Dimitri et Tyler . Je vois que tu as été attentif au déjeuner... C'est une histoire longue et compliquée et...

Sheeris baissa les yeux, tira nerveusement sur ses manches pour couvrir ses mains tremblantes . En vain, elles n'étaient pas assez longues. Elle finit par se triturer les mains en lui parlant la tête baissée.

Enfin si tu veux tout savoir, ils font parti de mon passé et je ne pensais pas les revoir un jour. Ça ne s’est pas très bien terminé la dernière fois que je le ai vu. Surtout avec Tyler en fait..  et là le voir revenir comme si de rien n'était comme si rien ne s'était passé et.... et.... Sa voix se brisa. Elle releva la tête et regarda Alec. Et je suis minable. Voilà. Et en plus je t'ennuie avec des bêtises. Tu as surement autre chose à faire  que de t'occuper d'une pleureuse inintéressante comme moi. Je ne veux pas abuser de ton temps.

Mais Sheeris avait besoin de parler, que ça sorte. 6 mois qu'elle broyait du noir, qu'elle n'avait personne à qui se confier. De toute façon je ne saurais pas par où commencer... dit elle si bas qu'elle n'était pas sure qu'Alec l'entende...

Le sujet était délicat. Sheeris tentait de lui répondre tout en évitant d'aborder ce qui la mettait dans un tel état. Alec pouvait voir sa détresse. Elle tremblait, ses mains s'agitaient entre elles. Elle baissait la tête ou regardait ailleurs. Sa voix se fit de moins en moins forte. Sheeris finit par le regarder pour se dénigrer.
Lui se contenta de lui sourire paisiblement. Dans un souffle, elle lui confia qu'elle ne savait même pas par où commencer. Ce qui était un signe en soi qu'elle était ouverte à l'idée de parler. Alec n'avait donc qu'à lui donner des pistes.

Je tiens d'abord à ce que tu saches ceci : je suis ici, avec toi, de mon plein gré. Si je reste avec toi, c'est que le je veux. Je souhaites t'aider, Sheeris. Appelle ça le syndrome du chevalier servant, ou l'appel du héros, comme tu veux. Je n'aime pas voir les gens tristes.

Il se redressa et regarda une seconde ailleurs en prononçant : Sauf ceux que je n'apprécie pas. Soyons quand même honnête.

Puis, de nouveau, il posa ses yeux marrons sur le doux visage de la demoiselle. Les couleurs des vitraux sur le côté illuminait sa peau et ses yeux de couleurs. Le rouge renforçait l'éclat flamboyant de sa chevelure, du bleu passait sur ses yeux tristes, tandis que du vert sur sa joue lui rappelait une nymphe des forêts. Ses lèvres charnues tremblotaient sous son petit nez retroussé tout à fait charmant. Alec voulait l'aider.

Aide moi à comprendre. Parle-moi d'eux. De Dimitri. De Tyler. Qui sont-ils ? et que s'est-il passé pour que tu puisses penser une seule seconde que tu es quelqu'un de minable et inintéressant ?

Il parlait d'une voix douce et posée. On pouvait néanmoins déceler une certaine incrédulité dans ses derniers mots.
Ils étaient si proches qu'il ne put retenir un geste envers elle. Il posa sa main sur le côté du bras gauche de Sheeris, son pouce la caressa en un geste apaisant.

Sheeris eut un léger sourire quand il parla du syndrome du chevalier. Cela faisait il d'elle une damoiselle en détresse?  Elle sourit plus franchement quand il lui dit qu'il était capable de ne pas aimer les gens. Il lui demanda de lui expliquer. Il voulait comprendre . Owen avait vu juste en l'appelant Sherlock tout à l'heure.

Il avait une voix apaisante. Quand la main d'Alec se posa sur son bras et que son pouce se voulut rassurant, un frisson parcouru Sheeris. Elle mit ça sur la différence de température entre leurs corps et le marbre. Avant de lui répondre, elle tira sa baguette de sa poche droite et la pointa vers le marbre. CALOR MEDIA dit elle d'une voix calme et posée. Le marbre se réchauffa et devient tiède comme si il était chauffé par le soleil. Elle remit sa baguette dans la poche de sa cape. Il faudra d'ailleurs qu'elle la reprenne car elle était trop grande. Elle finit par regarder Alec de nouveau. Il ne l'avait pas quitté des yeux durant toute l'opération. Il ne l'avait pas lâché non plus.

D'accord je vais te dire ce que je peux. Il y a 5 ans mes parents m'ont envoyé à BeauxBatons alors que mon frère était à Dumstrang. J'ai débarqué là bas. Étrangère parmi les français du Sud de la France... Je parlais mal la langue. Mieux que Nina ne parle la notre mais pas  beaucoup. Je ne me fis donc pas beaucoup d'amis. J'ai été répartie chez les licornes. On avait des cours en communs avec les Loups Argents et les Renards Dorés. C'est là que j'ai rencontré Dimitri et Tyler . Ils étaient inséparables. De vrais frères...

Elle fit une pause pour reprendre sa respiration. Elle frissonnait malgré la douce chaleur de la pierre. Ou à cause de la main d'Alec. Elle reprit.

On a commencé à bien s'entendre avec Tyler. Il est à moitié irlandais et il cherchait à s'améliorer en anglais et moi en français c'était bénéfique pour nous deux. Dimitri s'est ensuite ajouté à la liste . Il est devenu un peu mon frère à moi aussi, mon meilleur ami. Et Tyler... et bien lui est devenu mon petit ami. J'en ai fait des jaloux/ses . Tyler fait parti de la noblesse français et une petite anglaise sans une goutte de sang noble ne devait pas l'approcher selon certaines. Surtout Rebecca Dupont en faite...

Sa voix faiblit quelque peu. Elle posa sa main droite sur celle du jeune homme posée sur son bras .  La suite était difficile pour la jeune fille. Elle avait du mal à trouver les mots...

Je ... Elle.... comment dire... elle ne m'aimait pas beaucoup et m'en a fait voir de toutes les couleurs. C'est à cause d'elle que j'ai peur de voler. Durant ma première année elle m'a fait planer au dessus des remparts et je serais surement morte si Tyler et Dimitri n'étaient pas intervenus pour me sauver. Depuis je... je ne peux plus être dans les airs je n'ai pas peur du vide bizarrement juste de ne pas être reliée au sol.  

Nouvelle pause. Nouveau besoin de respirer. Elle serra la main d'Alec. Sa voix commença à faire des trémolos.

Tyler et moi ça a duré 4 ans.  Un bonheur pour moi et Dimitri ne nous a jamais quitté. On partait en vacances ensemble on allait les uns chez les autres je connaissais leur famille ils connaissait la mienne mon frère les adorait. Ils faisaient parti de la famille. C'était ma famille. Sa voix se brisa et des larmes lui troublèrent la vue.

Et puis... ce soir.... ce soir là est arrivé... Tyler a embrassé ... Rebecca... Je ... Nous.... Dimitri et moi n'avons jamais eu d'explication. Tyler s'est éloigné sans un mot sans rien. Il paradait avec l'autre... Sa voix se brisa nette et les larmes inondèrent son visage. Silencieuses mais abondantes. Elle les retenait depuis quelque temps et les dernières heures avaient beaucoup éprouvées la jeune fille.

Il nous a tourné le dos à Dimitri et à moi. Toujours avec ses potes de quidditch et ... les filles... Un mois durant je me suis faite harcelée par Rebecca et sa clique. Si Dimitri n'avait pas été là je ne sais pas ce que je serais devenue... Puis il y a eut ce jour où elle a eut la phrase de trop. ... Où elle m'a dit la raison pour laquelle Tyler était parti. Je ne suis pas une fille avec qui on prend son pied. J'étais un mauvais coup et il s'ennuyait avec moi.. Et là Dimitri et moi avons vu rouge... Il m'a laissé lui casser la figure et j'ai été renvoyée de BeauxBatons pour violence aggravée envers une famille de haut rang... Et depuis je n'ai eu aucune nouvelle... rien en 6 mois. Aucunes réponses.... Et ... et.... et.....

Prise de tremblements, Sheeris ne put continuer. Elle se recroquevilla sur elle même.

Elle tremblait encore. Alec mit cela sous le coup de l'émotion. Il garda sa main sur son bras mais cette fois-ci, il le lui caressait lentement, sur une petite zone, de haut en bas, de bas en haut, comme pour lui redonner un peu de chaleur dont elle semblait si dépourvue. Rien à voir avec le physique, c'était bien un manque émotionnel dont il était question. Alec était très attentif aux confidences de Sheeris et n'osa l'interrompre en aucun cas. Au milieu de son discours, elle posa sa main sur la sienne. Même inconsciemment, elle cherchait du réconfort. Sa voix montrait des signes de faiblesses mais la jeune fille faisait montre de courage. Elle continuait son histoire.
Enfin, elle aborda la partie délicate, celle dont Alec s'attendait. La trahison. C'était tristement convenu. L'histoire de Sheeris n'avait rien d'extraordinaire, Alec en avait lu des dizaines, en avait vu des centaines - ou tout du moins, il en avait cette impression. Cela n'empêchait en rien que sa gorge se serra à l'entente de la détresse de la jeune femme. Que son coeur s'indignait et demandait justice !
Sheeris, entre deux sanglots, persistait dans son effort de vouloir tout lui dire. Mais la douleur fut trop grande et elle s'effondra. Immédiatement, alors qu'elle se recroquevillait sur elle-même, que les larmes coulaient à flots sur ses joues rosies, il passa ses grands bras autour d'elle et la serra contre lui. Le mouvement fit déplier les jambes de Sheeris alors qu'Alec la prenait dans ses bras. Son bras gauche, en soutien, la tenait dans le dos. Sa main droite s'était posé affectueusement, protectrice, sur la tête de Sheeris qu'il avait calé dans le creux de son cou. Il la berça tendrement.

Alec en avait entendu assez sur le cas Tyler pour se faire une idée.

Ce Tyler est un idiot. Un sombre idiot.

En temps normal, Alec s'en serait tenu là dans son discours. Mais il se dit qu'il devrait peut-être développer un peu plus. Entendre la voix calme et posée de quelqu'un aidait à se calmer et Alec voulait réconforter Sheeris.

Il mériterait mon poing dans sa figure. Il mériterait que tout Poudlard lui colle son poing dans la figure. Et pourtant, je te promets, je ne suis pas quelqu'un prône à la violence. Mais là, ça me démange fortement.
Je ne le ferais pas. Mais si l'occasion se présente... Non, ce garçon ne mérite même pas l'heure de colle qui en résulterait. Encore que...

Alec débattait du pour et du contre. Il espérait que cela apaisait un petit peu Sheeris.

Quand à Dimitri, ton meilleur ami, je suis sûr que vous trouverez le temps de vous reconnecter. Lui aussi avait l'air... indécis en cours de potions. Et malgré toutes les épreuves que vous avez vécu ensemble, je dirais même plutôt grâce à ses épreuves, votre lien n'en sera que plus fort.
Il faut juste te dire qu'aujourd'hui, ce n'était pas le bon moment. Peut-être demain. Ou après-demain, qui sait ? Vous aurez tout le temps, tout le loisir de vous retrouver.

Il donna une légère pression à son étreinte.

En attendant que tu te sentes prêtes, je suis là pour toi. Vraiment. Tu peux compter sur moi.

Alec s'avançait peut-être un peu trop. C'était quand même la première fois qu'il s'impliquait autant dans une histoire de coeur, surtout une qui n'était pas la sienne, où il n'était pas concerné. Et pourtant, le sorcier n'allait jamais à l'encontre du destin. S'il se trouvait là, en cet instant, c'était qu'il avait sa part à jouer dans l'histoire de Sheeris. Et peut-être avait-elle une part à écrire dans la sienne...

Alors qu'elle allait se refermer sur elle même, les bras autour des jambes. Alec la surprit en la prenant dans ses bras. Il agit tellement vite qu'elle s'en trouva déséquilibrée. Elle finit allongée sur lui, comme un enfant qu'on berce après un cauchemar, sa main droite se plaça automatiquement dans son dos, serrant son pull pour retrouver un équilibre. Ses jambes repliées touchaient  Alec. Le bras gauche d'Alec lui tenait le dos et la maintenait fermement quoi que tendrement contre son torse. Sa main droite, elle, calait sa tête dans le creux de son cou avec beaucoup de délicatesse.  Il avait une odeur boisé d'aftershave.

Ce Tyler est un idiot. Un sombre idiot. Elle voulut se rebeller contre cette idée car Tyler était loin d'être idiot mais n'en eut pas la force. Après tout, il avait agit d'une manière qu'elle n'avait toujours pas comprise. Alec continua à lui parler d'une voix calme et posée. Elle entendait son coeur battre. Elle posa sa main gauche sur sa poitrine pour sentir les battements réguliers de son coeur.

Il mériterait mon poing dans sa figure. ... Et pourtant, je te promets, je ne suis pas quelqu'un prône à la violence. Mais là, ça me démange fortement . . . Ce garçon ne mérite même pas l'heure de colle qui en résulterait. Encore que...

Au fur et à mesure qu'elle l'entendait parler et que son coeur battait la mesure,  les larmes se tarissaient. Elle commençait à se calmer et à mieux respirer. Elle devait d'ailleurs avoir bien tremper les vêtements du serdaigle. Elle s'apaisa tout à fait quand il lui parla de Dimitri. Oui il était vrai que tout ne pouvait pas se résoudre du jour au lendemain. Il ne devait pas lui en vouloir tant que ça vu qu'il était venu la voir en potion. Là où elle avait encore tout gâcher... Et Tyler ?? Pourquoi était il là ? Qu'est ce qu'il lui voulait? Pourquoi s'être occupée d'elle? Pourquoi pleurait il?

Comme s'il l'avait sentit repartir dans des pensées noires, Alec resserra son étreinte et lui dit En attendant que tu te sentes prêtes, je suis là pour toi. Vraiment. Tu peux compter sur moi. .  Elle sourit. Elle ne savait même pas pourquoi mais les paroles du serdaigle la touchaient en plein coeur. Elle resserra elle aussi son étreinte. Sa main remonta le long du torse d'Alec et vint se poser sur sa joue. Une barbe de trois jours bien entretenue rendait la joue douce sous les doigts de Sheeris. Elle y exerça une légère pression pour tourner le visage d'Alec vers le sien.

Elle avait surement les joues roses et les yeux brillants à cause des larmes mais elle savait que son maquillage n'avait pas bougé. Elle avait pleuré assez de fois pour savoir que celui là tenait la distance et que même un tour dans le lac ne l'enlèverait pas. Elle releva la tête vers son visage, plongea son regard dans le sien et lui fit un sourire très doux.

Merci de m'avoir écouté, de m'avoir supporté. Mais fais attention à ce que tu dis je pourrais te prendre au mot et ne plus te laisser partir. Parce que vois tu là tout de suite je suis comment dire... bien? Elle n'osait pas dire à l'aise et en confiance... voire à sa place. Je ne me sens pas de retourner dans le monde derrière la tenture... Et crois moi je ne suis pas le genre de fille que tu aimerais garder dans tes bras.  

Alors qu'Alec venait de lui faire voeux de fidélité, en quelque sorte, le jeune homme sentit qu'elle lui rendait son étreinte. La petite main de la demoiselle remonta sur sa joue barbue pour s'y poser d'abord, puis ensuite lui faire tourner le visage vers elle. Alec qui ne faisait que la tenir, la laissa éloigner son visage de son torse pour le regarder dans les yeux. Sheeris avait les yeux brillants. Ils étaient rougis par les larmes dont les sillons étaient encore visibles sur ses joues rosies. Mais toute trace de détresse avait disparue. Ce regard-là était doux, apaisé. Alec s'en félicita. Il lui rendit son sourire alors qu'elle reprenait la parole. Elle reprenait du poil de la bête et cela plaisait au grand barbu qu'il était.
Dans un geste tendre, il déposa un doux baiser sur le front de la jeune fille avant de la caler à nouveau dans le creux de son cou. Son menton posé sur le haut de son crâne, Alec lui répondit :

Sottises ! Tu es très bien dans mes bras. Et on est pas obligé de sortir tout de suite. On n'a qu'à rester un moment tous les deux ici.

Alec avait très bien entendu la remarque de Sheeris, cette envie qu'elle commençait à avoir de le garder. Il avait énormément apprécié ces mots, comme tout adolescent qui rêve d'être inclus quelque part, avec quelqu'un. Alors sans s'en rendre vraiment compte, il murmura Tu m'auras aussi longtemps que tu le voudras.
Ils restèrent un moment enlacés de la sorte. Un court moment ? Un long moment ? Alec ne saurait le dire. La lumière dans son dos changeait lentement.

Comme toute bonne chose a une fin, le rappel à la vie se fit sentir de plus en plus fort en Alec. Il faisait de son mieux pour ne pas briser leur petite bulle, pour préserver encore un peu Sheeris de la laideur et de l'agression du monde extérieur, mais la Nature est reine et souveraine. Il déglutit.

Tu sais pourquoi Mère Nature a inventé la vessie ? demanda-t-il avec un sourire dans la voix. Il patienta quelques secondes avant de répondre : Pour que les humains ne se transforment pas en statue. Il enchaîna alors qu'il desserrait son étreinte et qu'il revoyait le visage de Sheeris : Si on faisait un stop aux toilettes avant que je ne te raccompagne... où tu veux aller ?

Alec ressentit un énorme vide lorsqu'elle quitta la chaleur de ses bras. Cette sensation était déplaisante au plus haut point, mais alors qu'elle remettait ses chaussures et de l'ordre dans sa tenue, il se leva et chassa cette pensée de son esprit. Il attendit qu'elle soit prête et il souleva un pan de la tenture, les renvoyant tous les deux dans les méandres de la réalité.

Alec lui souria. Il avait un joli sourire. Mais elle ne s'attendait pas à ce qu'il l'embrasse sur le front ni à ce qu'il l'embrasse tout court d'ailleurs. Elle en resta un instant interdite. Alors qu'il lui parlait, le menton posé dans ses cheveux, Sheeris eut une drôle de sensation dans l'estomac... comme un envol de papillons, des petits chatouillis.

C'était loin d'être une sensation désagréable. Elle avait déjà resenti cela avant, il y a quelques mois, peut être même années. Mais elle se refusa à analyser tout cela. Elle avait déjà bien assez analysé pour aujourd'hui, cerveau et coeur se mettaient en grève.

Elle crut rêver quand il lui murmura qu'elle pouvait l'avoir aussi longtemps qu'elle le voulait. Qu'est ce que cela pouvait bien signifier?? Elle décida qu'elle y réfléchirait à tête reposée. Là elle décida de vivre le moment, de fermer les yeux et de profiter de la paix qu'Alec lui offrait.

Combien de temps sont ils restés comme cela? Mystère pour Sheeris. Elle le sentit juste s'agiter légèrement et se retenir de bouger. Elle aurait pu se redresser et lui dire de partir mais elle voulut le garder encore un peu pour elle même si le marbre commençait à reprendre sa température d'origine et que ses pieds refroidissaient. Il finit par rompre le silence en lui faisant une devinette.

Elle rit légèrement. Il lui avait mis du baume au coeur. Oui tu as raison j'en profiterais pour me débarbouiller. Je dois avoir l'air très négligée... Où je vais? ... Où je vais... Je dois retourner à la salle des potions. J'ai promis à Simon de venir le chercher après son heure de colle. Il était tellement désolé de m'avoir fait peur que je ne pouvais pas lui refuser .

Elle chaussa ses talons, remit son pull en place et plissa sa veste décidément trop grande . Elle vérifia que sa baguette était toujours là. Alors qu'Alec soulevait la tenture et se pliait pour la laisser entrer dans la réalité, elle stoppa à sa hauteur et posa ses lèvres sur sa joue barbue pour un léger baiser. Merci dit elle simplement . Et elle passa de l'autre côté de la tenture où, avec un grand sourire, elle lui tendit la main pour qu'il entre dans la réalité et qu'il la guide tel le lapin blanc sur le bon chemin (vu qu'elle ne savait pas où il l'avait emmené).

Alors que le couple ressortait de leur cachette, main dans la main, le sourire aux lèvres et qu'ils s'en retournaient vers les escaliers afin de se rendre aux sous-sols, les tableaux dans le couloir du 3ème étage s'agitaient. Les portraits de sorciers et sorcières ayant vécu au Moyen-Âge se rassemblèrent dans une peinture d'une prairie plus dégagée, où la propriétaire des lieux s'excitait déjà à annoncer la bonne nouvelle à ses copines. « Il est revenu ! Je l'ai vu ! » s'exclama-t-elle alors que sa bande de commères était enfin au complet. « Où ça ? Où ça ? » lui répondit-on en gloussant. « Il  vient juste de sortir de sous la tenture à la Licorne ! Là ! Avec la petite gryffondor rousse ! » Des exclamations de joies, d'excitations se firent entendre dans tout le groupe.
Dans le tableau voisin, autour d'une table en bois et d'un simple couvert, se tenait une autre réunion. Plus masculine. Les portraits-sorciers Messieurs s'étaient eux aussi réunis, à l'écoute des informations de ces Dames, mais leur air était plus sombre. Ils étaient contrariés.
Soudain, traversant leur tableau, une jouvencelle, portant son fatras de froufrous, courrait en riant. Elle rejoignit ses comparses en criant : « C'est Lui ! C'est Lui ! C'est bien Lui ! » Les portraits-sorcières Dames accueillirent la petite dernière à grands sourires, alors que cette dernière reprenait son souffle pour annoncer la nouvelle :
« Merlin est de retour ! »